je passe au second point, la presse numerique, je vais parier de trois pr avant de vous laisser la parole. Trois problèmes euh... le second est la presse numérique. Je dirais que le web, le web2 est en train de révolutionner, vous le savez, les médias et la presse parce que le web2 remet en pratique un modèle traditionnel, celui des journaux et celui des télévisions, des chaînes généralistes c’est-à-dire d’une information diffusée de haut en bas par des journalistes professionnels. Comme avec le web2, chacun peut devenir un publilecteur, vous connaissez sans doute cette expression, hein, et même à la limite chacun peut devenir quelque chose ou rêver de devenir un citoyen-journaliste, bien, euh... au moins il peut interagir avec les journalistes et on voit, euh, on voit euh... on voit évoluer complètement les pratiques. Les pratiques des lecteurs de la presse, mais aussi les pratiques des journalistes, les pratiques des lecteurs qui changent considérablement, j’en parlerai tout à l’heure avec les agrégateurs de news, que vous connaissez google news, etc., qui sont des agrégateurs modulables par chacun. On en parlera. Et puis il y a les pratiques journalistiques qui s qui changent, hein, euh... on voit des rédactions en ligne fusionner avec des rédactions traditionnelles, ça s’est passé il y a pas longtemps dans le journal Les Echos». On voit apparaître des journaux comme « le Monde», le Figaro, Libération en France, hein, où, euh... il y a une une interaction importante entre l’information en ligne et l’information papier. On voit arriver aussi quelque chose, on n’a pas de nom en français pour en parler, qui s’appelle les pure players, les pure players, ce sont ces journaux qui sont payants ou non payants, souvent payant comme « Médiapart », comme << Rue 89», etc., ce sont des journaux qui sont entièrement sur Internet, euh... y a plus de support papier. Alors, c’est un mouvement passionnant, c’est quelque chose qui est en train de naître sous nos yeux, on sait pas trop où ça va aller, mais c’est un mouvement qui comporte des risques mais qui comporte aussi des espoirs, qui fait naître des espoirs. Je voudrais très rapidement parler des risques. Trois problèmes liés à la presse: l’éclatement d’abord de l’espace public. Qu’est-ce que je veux dire par là? C’est que la presse en Europe, elle a été liée depuis le début à la démocratie. Elle est encore une institution essentielle de la démocratie car elle permet de créer, vous connaissez l’expression, un espace public, c’est-à-dire un lieu où des citoyens, qui ont des intérêts divers, des valeurs diverses, des croyances diverses, peuvent s’informer, peuvent débattre, peuvent se forger progressivement une opinion sur des questions qui relèvent de l’intérêt commun. Or, or avec les blogues, avec la multiplication des réseaux sociaux, des sites de toute nature, vous savez qu’on assiste actuellement à un éclatement assez impressionnant, hein, un éclatement de l’espace public comme si l’élargissement du public allait de pair avec une fragmentation. Et on le voit bien en particulier, je donnerais qu’un exemple de cela, avec la fin des journaux par paquets. Vous savez ce qu’on appelle un paquet? Quand vous achetez au kiosque du coin un journal, vous achetez tous les articles à la fois. Ça ne veut pas dire que vous allez les lire tous. Il se peut que vous sélectionnez et généralement c’est le cas. Mais vous les aurez vus au moins. Vous aurez vu qu’il y a quelqu’un qui n’est pas de votre avis. Or, vous savez que maintenant avec ce qu’on appelle les agrégateurs de news dont j’ai parlé tout à l’heure, chacun se fait son journal. C’est-à-dire que chacun choisit ses articles. Aller sur quelque chose qui s’appelle « Netvibes >> vous verrez, c’est un site français remarquable, c’est un agrégateur de news, vous verrez comment chacun peut se faire son propre son propre journal à tel point qu’il y a un sociologue américain qui s’appelle Sunstein qui a fait un jeu de mots qui est amusant en anglais, un peu moins en français, il a dit chacun se fait son Daily Me, c’est-à-dire son quotidien du moi. Alors, ça peut être très bien, ça vous donne une grande liberté. Mais en même temps
vous voyez, vous voyez l’inconvénient. C’est que si vous choisissez vous-mêmes vos articles, si vous êtes de gauche vous allez choisir des articles de gauche, si vous êtes de
droite, vous allez choisir des articles de droite, si vous êtes un fana du foot, il n’y aura que du foot dans votre information. Et puis au total qu’est-ce que vous écouterez, qu’est-ce qui va vous revenir? L’écho de votre propre voix. C’est-à-dire que vous allez être en quelque sorte enfermés en vous-mêmes, or l’intérêt d’un journal, je l’ai dit tout à l’heure c’est de créer un espace public, c’est de créer un journal où vous puissiez rencontrer d’autres opinions que la vôtre. C’est un véritable problème.
Le deuxième problème, c’est euh... je l’ai mis sous forme d’interrogation : la fin du journalisme? La fin du journalisme, qu’est-ce que je veux dire par là? Que on assiste à l’affaiblissement. Vous savez que la presse est dans un triste état actuellement, la presse écrite. On assiste à l’affaiblissement des euh... journalistes traditionnels qui filtraient l’information, donc un journaliste, c’est un métier particulière particulier, il filtre l’information, ce qui assure une certaine objectivité de de l’information, il met en forme, il hiérarchise l’information, ils garantissent une une investigation sérieuse par le recoupement des sources en particulier, ils assurent le secret des sources, la maîtrise de la diffusion, et puis la protection des droits d’auteurs aussi puisque ils sont responsables juridiquement de leurs écrits. Or tout cela est en train de se modifier considérablement avec Internet, puisqu’il suffit d’avoir une petite expérience d’Internet pour voir que on a l’impression quelques fois d’être devant un espace où règnent l’anarchie, l’agressivité des débats, regardez les forums, certains forums, la fausseté des informations, la diffusion des rumeurs en quelques minutes sur toute la planète, le pillage des œuvres protégées, ou simplement des propos
anecdotiques, des propos, des émotions euh.. des jugements de valeur à l'emporte- pièce, sans la moindre vérification, sans la moindre justification. Et bien sûr, un tri se fait dans toute cette énorme masse, cette énorme masse, mais vous savez par quelle méthode? Par la méthode de l'audimat en quelque sorte. Plus de gens sont intéressés mieux vous êtes classés. J'en ai parlé tout à l'heure Alors on peut résumer cela en un mot, le risque c'est de remplacer l'élitisme qui existait dans la presse ancienne ou dans les télévisions traditionnelles, remplacer l'élitisme qui est une conception souvent un peu paternaliste de la communication, souvenez-vous par exemple du courrier des lecteurs, courrier des lecteurs, vous aviez le droit à écrire 4 ou 5 lignes, ça n'existe plus le courrier des lecteurs aujourd'hui vous remplissez un commentaire, vous remplissez un blogue, etc. Bon, donc une conception élitiste un peu paternaliste et o risque de la remplacer par quelque chose qu'on pourrait appeler populiste. Qu'est-ce que je veux dire par populiste ? C'est croire, ce qui est une illusion un peu dangereuse, que chacun peut être journaliste, croire que chacun peut être prof, croire que chacun peut être médecin, hein, euh... etc, qu'il n'y a plus de de spécialistes en quelque sorte. Et je dirais une dernière chose enfin, ce que j'ai appelé le freemium, c'est un mot que vous ne connaissez pas, c'est un un neologisme, un mot qui a été forgé en Amérique. Qu'est-ce qu'on appelle le freemium? Je vais le résumer très rapidement. C'est que de plus en plus, le web2.0 a donné naissance à d'énormes groupes euh... d'énormes groupes de de presse, euh au niveau international, et que dans ces groupes, L'information l'information gratuite, parce qu'elle est presque toujours gratuite, hein, cette information gratuite n'a plus qu'une place secondaire, elle est une des dimensions, si vous voulez, du divertissement. Et cette information en plus, j'imagine que vous le savez, elle est extrêmement soumise à la publicité mais à une publicité d'un type tout à fait nouveau. Euh... je pense que vous savez comment fonctionne la publicité sur Internet. C'est-à-dire dans un journal traditionnel, la publicité n'est pas liée à un article, la publicité elle est dans le journal. Par contre sur Internet, imaginez que vous ayez une publicité pour les antidépresseurs, une euh pardon, un article sur les antidépresseurs, pas en France, parce que en France, la publicité pour les antidépresseurs n'est pas autorisée, mais partout ailleurs là où la publicité pour les antidepresseurs est autorisée, vous allez avoir énormément de pubs qui vont financer l'article sur les antidépresseurs. Donc l'article, il va passer en première page. Et à la limite, d'autres articles, par exemple, sur une maladie rare en Afrique, ou même sur une maladie africaine tout simplement, n'attirera pas la publicité et donc risque purement et simplement de disparaître. C'est ce qu'on appelle le freemium, alors pourquoi free? Free comme libre, donc une information libre, gratuite, gratuite mais de mauvaise qualité et puis en plus une information très subjective, biaisée par ce rapport à la publicité dont j'ai parlé puis de l'autre côté, freemium comme premium, premium signifie excellent, donc par ailleurs une information payante, donc une information à deux vitesses. Voilà ce que c'est que le freemium, une information payante réservée à ceux qui peuvent se payer un abonnement à tel journal où vous avez une information plus objective, plus développée, réservée done à une certaine élite, à des décideurs économiques, politiques, des chercheurs, etc.
Voilà les trois problèmes. Ceci dit, je voudrais aussi présenter pour en terminer avec ce deuxième volet, vous présenter des raisons d’espérer. Les raisons d’espérer, j’ai repris les trois problèmes. La première raison d’espérer, c’est l’extension de la démocratie. L’extension de la démocratie parce que il faut rappeler que même si l’élargissement de l’espace public s’est accompagné d’une fragmentation, j’en ai parlé tout à l’heure, hein, aujourd’hui on voit que les réactions des citoyens face au à l’information, face aux décisions des états, bien, ces réactions peuvent entrer directement dans l’espace public. Autrefois, les réactions elles existaient mais au sein de la famille, au café du coin, on parlait de ce qui se disait à la télévision, mais
maintenant ça peut être publié directement par les blogues par les réseaux sociaux, etc, et c'est une formidable extension de la démocratie puisque le public prend la parole sans qu'on lui demande de le faire, sans attendre l'autorisation, et il la prend, dans quelquefois dans le langage de tous les jours, c'est-à-dire même en ne respectant pas beaucoup la syntaxe et la langue française, et le public sui... définit lui-même les sujets dont il veut débattre. Là je crois que c'est vraiment quelque chose de fondamental. C'est ce que j'ai appelé l'extension de la démocratie.
Deuxièmement, un nouveau journalisme. J’aurais dû mettre un point d’interrogation, hein, puisque j’ai parlé tout à l’heure de l’affaiblissement progressif des journalistes, mais euh.. il ne faut pas oublier aussi que ce modèle des journalistes traditionnels, c’était un modèle un peu paternaliste, avec un contrôle de l’information, et puis un public relativement passif, hein. J’ai parlé du courrier des lecteurs tout à l’heure ou de celui qu’on interviewe pendant 30 secondes dont on ne saura même pas le nom dans une radio. Or, aujourd’hui on voit apparaître une sorte de journalisme nouveau qui est une synthèse, une complémentarité, entre le journalisme professionnel et puis les interventions actives des citoyens. Alors ça prend des formes diverses, par exemple vous avez les commentaires au bas des articles de journaux. Et puis même quelquefois, les journalistes reprennent, pas seulement des commentaires, mais des blogues, euh... entiers qui deviennent qui deviennent quasiment professionnels, qui se professionnalisent grâce à l’aide des journalistes. Et inversement, donc la pratique des journalistes se transforme mais aussi la pratique des blogueurs, les blogueurs deviennent plus professionnels. On assiste en particulier dans ces journaux que j'ai appelés les pure players, cette presse nouvelle, Médiapart», «Rue 89, il y en a beaucoup. il y a aussi il y en a d'autres qui sont pas payants par exemple un journal. je ne sais pas si on peut l'appeler un journal comme Doctissimo ou bien. Au féminin.com », etc, il y a une collaboration extrêmement étroite entre d'une part des experts, ça peut être des médecins, ça peut être des journalistes, etc., et puis le public qui n'est pas réduit à un rôle purement passif. Et il me semble qu'on est en train, dans ce nouveau journaliste, d'éviter les deux écueils dont j'ai parlé tout à l'heure, celui, donc... l'élitisme euh... qui qui réduit le public à l'état de passif mais ni le populisme, la croyance fausse que chacun peut devenir journaliste.
Enfin, je terminerai sur le nouveau modèle économique pour la presse. Là j'irai vite, hein, en disant que le danger du freemium existe mais qu'on voit apparaître des formes intéressantes, intelligentes de freemium, c'est-à-dire, prenez des journaux comme par exemple << le Monde en France ou comme « Libération » ou comme <<<le Figaro», eh bien, vous avez là une partie gratuite, de bonne qualité mais qui est un produit d'appel. Si vous voulez plus, si vous sentez le besoin de davantage de de d'informations, hé bien vous allez passer au payant... mais euh... c'est un modèle très très très intéressant parce que chacun peut dépenser ce qu'il veut, accorder l'intérêt qu'il veut au au média, il a le choix là. Donc je crois que c'est quelque chose qui se met en place et il me semble que pour terminer, on peut être euh... on peut être relativement optimiste sur l'évolution de la presse.